Du 22/03/12 au 03/04/12… Cash à l’eau et cachalot

Publié le par Petitjean

                Kaikoura mes amis, Kaikoura! Voilà où j’ai passé la dernière semaine et demi, dans cette petite ville sur la côte nord est de l’île du sud. Un des derniers endroits que je voulais voir à tout prix avant de quitter ce pays. Que d’aventures j’y aurai vécues… Un endroit qui sectionne de l’octopus septuagénaire !

 

Mount Fyffe (15)

Depuis les 1602 mètres du Mont Fyffe (aucun rapport, amis québécois), un aperçu de la petite bourgade cotière de Kaikoura, devinable sur la gauche.

 

 

Mount Fyffe (22)

Au sud de Kaikoura, on trouve un pic, un cap, que dis-je… Cinq énormes bras qui avancent sur le Pacifique et offrent des points de vue sympathiques.

 

Sunrise on the peninsula.. (2)

Parfois on se lève avant le soleil pour souhaiter un anniversaire, et on assiste à ça…

 

Chapitre 1 :  Boulet de Bresse

 

 J’avais rencontré Fabienne, aimable française, quelques heures plus tôt sur son lieu de Wwoof. C’était le soir, on avait mangé un plat très sophistiqué à base de courgette et aussi de courgette avec un peu de courgette et de courgette. On avait prévu d’aller voir les manchots arriver à la tombée de la nuit. On a parlé, parlé, parlé, et on est partis avec moins trente minutes d’avance.

J’ai sauté dans la voiture. Il pleuvait. Il faisait sombre. J’ai vite reculé pour gagner du temps pendant que Fabienne ouvrait le portail. J’ai pas vu l’arbre. Bruit. Fabienne a refermé le portail et est allée chercher deux frontales et une pelle pour ramasser les bouts de verre.

Le lendemain, j’ai contacté cinq carrossiers qui m’ont tous dit : « Sorry, we can’t help you ». Le sixième a dit: « 533 Dollars, mate ».  J’ai entendu : « You won’t have any money left, stupid tourist».

J’ai pensé « Trop cher, ça craint ». J’ai dit « Ok, thanks a lot. » 

Bref, j’ai pété mon pare-brise arrière en Nouvelle-Zélande.

 

Bye bye pare brise! (3)

Bye bye pare brise! (4)

 

Arbre 1-0 Zazou

 

 

Chapitre 2 :  J’ai 100 poussins, je n’en veux que 99… Ben j’en pousse un.

 

                Mais mon quotidien Kaikouresque ne fut pas uniquement fait de panoramas de déglingo et de rage de glace aussi cocasses. Je me suis aussi rendu un peu utile! Fabienne, outre son agréable compagnie et le gîte qu’elle m’a offert le temps que le popotin de ma maison mobile subisse un peu de chirurgie esthétique, m’a aussi donné d’intéressants contacts au Department Of Conservation (DOC).

C’est ainsi que je suis devenu bénévole la plupart des matins de cette semaine et demi dans l’équipe de conservation des Hutton’s Shearwater. On ne sait pas énormément de choses sur cette espèce d’oiseau du genre puffinus (oiseau marin de la taille d’une petite mouette, en beaucoup plus classe) si ce n’est qu’elle est désormais rarissime à l’échelle du globe au point qu’elle ne se reproduit que dans les montagnes de l’arrière-pays de Kaikoura. Les populations sont encore assez denses, mais il ne reste cependant que deux des sept anciennes colonies naturelles à cause de l’activité accrue des prédateurs exogènes notamment, mais aussi des glissements de terrain qui ont détruit bien des sites de nidification lors des derniers séismes.

 

 

Volontariat Hutton Shearwater (10)

Environ 40 cm d’envergure et 500 grammes pour ce charmant petit oiseau marin

 

Pour faire court, le DOC s’occupe des bébés puffins de leur naissance jusqu’à l’envol avec l’objectif premier de maximiser leur survie durant cette période. Les œufs et les poussins ont donc été récupérés au début de la saison de reproduction et placés dans des terriers artificiels face à l’océan, sur un des flancs de la péninsule de Kaikoura. Chaque matin, l’équipe de bénévoles dont j’ai été ouvre les terriers un à un, récupère le petit s’il est encore présent, le pèse, mesure ses ailes, le nourrit jusqu’à ce qu’il n’ait puffin, s’assure de sa bonne santé et le remet à sa place.

 

 

Le site hébergeait environ 110 petits au début de la saison, mais l’âge de l’envol (a priori entre 6 et 8 semaines) approchant, on trouve de moins en moins de bébés dans les nids chaque matin ! Ils s’en vont à tir d’aile vers leur vie d’adulte sauvage… seulement une petite vingtaine de Tanguy est toujours à charge, à présent.

 

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Volontariat Hutton Shearwater (13)

 

Numéro 37, pas bouger!

 

Le second objectif, plus ambitieux, est d’inciter les puffins adultes à nidifier spontanément sur ce site de soin. Les oiseaux bénéficieraient alors d’un site sécurisé au niveau glissement de terrain ainsi que de l’isolement des prédateurs par une barrière ultra efficace, sans oublier la veille scientifique du DOC. Mais comment les convaincre ? Principale raison d’espérer : les puffins sont des oiseaux qui reviennent souvent nidifier là où ils sont nés.

 

 

Chapître 3 :  Auguste océan

 

                Mais la raison qui m’a poussé à cocher Kaikoura comme une étape incontournable de mon périple, c’est sa renommée mondiale pour l’observation des mammifères marins. C’est donc avec l’espoir de voir des baleines que j’y ai posé mes valises.

 

                La Nouvelle-Zélande est constituée de deux îles d’une superficie grande comme l’Italie. Alors pourquoi n’observer les cétacés que depuis un endroit précis, un unique point sur  cette bande littorale de milliers de kilomètres? Simplement parce qu’à hauteur de Kaikoura, les fonds marins présentent un relief particulier. A une dizaine de kilomètres au large des plages de la ville, on trouve un immense canyon pouvant atteindre 1600m de profondeur au plus fort de la dépression. De quoi y empiler sept fois la Sky Tower d’Auckland ! Au fond de ce canyon se sont engouffrés des courants marins si puissants qu’ils embarquent avec eux le moindre organisme qui passe à proximité. Une aubaine pour les baleines, prédatrices de bancs de poissons, poulpes et autres délices marins! La singularité de l’endroit a ainsi poussé un grand nombre de Sperm Whales (ce que nous, en français, appelons cachalot) à se sédentariser près de Kaikoura. Voilà la raison pour laquelle la ville a construit son identité autour de cet animal, et pourquoi les compagnies de croisière peuvent se permettre d’afficher un taux de réussite racoleur de 99% sur leur sortie en mer pour voir des baleines !

 

 

                Peaufinons le portrait de nos cachalots. Au large de Kaikoura, seuls des mâles sont observés : les femelles, plus petites et moins riches en graisse, ne s’aventurent pas dans les eaux froides du sud. Les mensurations de ces messieurs se passent de commentaires : 16 à 18m de long pour une quarantaine de tonnes. Aussi longs que le bateau touristique qui mène jusqu’à eux, mais deux fois plus lourds… Hey, les mecs, faudrait voir à arrêter de forcer sur le krill!

                Les observations se déroulent de la façon suivante : le bateau s’approche à une trentaine de mètres de l’animal quand ce dernier remonte respirer à la surface. On voit alors dépasser de l’eau quelques dizaines de centimètres de dos du cachalot offrant toute les trente secondes de ces fameux jets  verticaux qu’on a tous vu au moins une fois dans un documentaire de Cousteau ou sur une boîte de sel de table. Après 10 à 12 minutes d’exhibition, le cachalot retourne se cacher dans les abymes et ce n’est que 40 à 60 minutes plus tard qu’il se remontrera, ridiculisant le plus humblement du monde les records d’apnée de Stéphane Mifsud.

 

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Sans doute ces photos resteront-elles comme celles de mon voyage qui rapportent le moins fidèlement le gigantesque du moment…

 

Alors pourquoi ne pas poster des photos de Sarah, très sympathique belge rencontrée en ville et qui travaille quotidiennement sur les bateaux du Whale watch! :-) Avec, cerise sur le gâteau, du gros matos photo... ça donne ça.

 

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                Bon, voilà pour l’aspect scientifique et froid. Quelle émotion ça procure de voir une baleine ? En montant sur le bateau, j’avais un peu peur. Peur d’être déçu, peur de m’être représenté ce moment trop de fois dans mon esprit, de m’en être construit une idée trop grandiose. Un peu peur financièrement aussi, est-ce que je n’étais pas là en train de gaspiller une bonne centaine d’Euros avec ma philosophie du « ce ne sera qu’une seule fois dans ta vie » ? Exactement le slogan qu’on lit sur les prospectus des croisières...

                Et puis ensuite, notre bateau, le Wawahi, a quitté le port. Est-ce à cause du roulis que mon ventre s’est noué et qu’une petite boule est venue toquer à la porte de ma gorge… ?

Quand Tiaki, un cachalot bien connu des locaux pour fréquenter les eaux locales depuis des lustres, a montré le bout de son dos, j’ai trouvé la réponse à ma question. C’est peut-être ridicule, mais j’étais vraiment et sincèrement ému. J’ai probablement affiché sans m’en rendre compte un sourire débile qui faisait trois ou quatre fois le tour de ma tête. Merde, une baleine, quoi… C’était pas des blagues, ce qu’ont nous raconte dans les documentaires sur Arte. Ça existe vraiment. Tiaki était là, devant moi, je l’entendais bouger dans l’eau du Pacifique, quelques tours de moteur de plus et j’aurais même pu toucher sa peau visqueuse ou me faire asperger de son jet. Lui il restait plutôt serein, tu parles, des badauds comme moi il en voit tous les jours! Pas de lézard, il respirait un grand bol d’air, tranquille sous le ciel bleu de l’hémisphère sud. Le va et vient des vagues laissait entrevoir des portions plus ou moins grandes de son corps massif. On aimerait qu’il saute, qu’il se montre, qu’on le voit un peu plus, qu’on admire encore un peu mieux à quel point la nature s’est offert une petite folie en accouchant d’une telle créature ! Mais je crois que l’énormité d’une rencontre avec une entité si mythique, c’est aussi qu’on ne la maitrise pas. On ne décide de rien, et de toute façon, si on y réfléchit, on ne souhaite pas réellement maîtriser quoi que ce soit. On se laisse faire,  tant pis pour la curiosité trop gourmande de nos petits yeux, c’est justement parce qu’on subit qu’on se sent si petit.

Et puis, sans trop prévenir, le dos glisse, se contorsionne lentement, tourne vers l’avant jusqu’à ce que se soulève hors de l’eau la majestueuse nageoire caudale qui termine le spectacle en saluant son audience dans un doux remous même pas si bruyant que ça. Bye bye, Tiaki, et merci…

 

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Seconde photo: Sarah Rousseaux

 

Certains se plaisent à voire dans la forme de la péninsule de Kaikoura ce triangle gracieux qui clos le bal…

 

Cette tempête émotive explique en partie, avec le fait qu’un bateau ça bouge vraiment énormément, que je n’ai pas fait des tonnes de photos malgré ce que j’avais sous les yeux. Envie d’en profiter au maximum, de ne pas en louper une miette…

 

                Pour ne rien gâcher, la pleine mer n’est pas peuplée que de cachalots :-) Si je n’ai pu apercevoir les orques qu’aux jumelles depuis la terre ferme de la péninsule, les albatros, toujours aussi immenses, ont eux participé au festival observable depuis le bateau, tout comme les otaries devenues très communes pour moi. Et puis se sont également invités une multitude de Dusky Dolphins… Environ 400 selon les guides, qui sautaient hors de l’eau pour saluer notre passage, nageaient sous le bateau pour s’amuser des vagues, faire la course et nous montrer comme ils sont plus rapides et plus agiles que notre monstre de ferraille ! Grandiose aussi…

 

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Une danse aquatique faite de sauts, d’entrecroisements, de zigzags et de courbes qui respirent le bonheur !

 

 

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                Cerise sur le gâteau, virevoltants au dessus de l’eau ou posés à la surface, des puffins de Hutton qui cette fois-ci n’ont pas besoin d’être assistés !

 

Se faire arracher une dent douloureuse à l’autre bout de la terre : check.

 

                Je me suis bien étendu, woops… C’est tellement facile d’écrire des tartines quand on voit de telles choses. Vous l’aurez compris, Kaikoura est peut-être une ville qui aura percé mon porte monnaie, mais c’est aussi une ville dont je me rappellerai longtemps et qui en valait la peine !

 

Prenez soin de vous !!!

A très bientôt

 

Laclément,

FTH

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M
Tant va le cachalot qu'à la fin ilse casse !<br /> Kicékonorakomprésident.
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M
J'ai oublié la formule de politesse:Confiturebonnemaman.
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M
Hip hip hip Kaikoura
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M
Bon je manque de superlatifs.Grandiose,c'est déjà fait ?<br /> Deux questions existentielles me taraudent.<br /> Est ce que les ptites souris néo zelandaises sont aussi généreuses que les françaises quand on perd une dent?<br /> Deuxio:Est il exact que la baleine bleue cherche de l'eau pour réparer tous ses tuyaux ?<br /> Bisou mon fils.
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M
Marianne a raison, ce récit sur les baleines et les dauphins est plein d'émotions ! Peut-être n'est-ce que notre sentiment des temps anciens où nous aussi étions dans l'eau qui ressurgit !!<br /> <br /> Et même si tu trouves que tes photos ne sont pas à la hauteur du spectacle, c'est un vrai bonheur que de les voir, et merci de nous les faire partager ;-))<br /> <br /> Porte toi bien, Bisous, MT
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